Beaucoup de monde nous avait dit le plus grand bien de Buenos Aires. Peut-être parce qu'on supporte de moins en moins les grosses villes en voyage, peut-être aussi à cause de la période des fêtes qui l'a rendue "fantôme" quelques jours, nous avons eu pour notre part des hauts et des bas ici, et un sentiment un peu mitigé.
Ville "ancienne", à l'européenne, sans merveille naturelle (comme Rio ou Le Cap) ou architecturales (comme Paris ou Rome), BA se laisse visiter quartier après quartier, misant sur un certain charme, une belle architecture, de bons restos et du tango pour accueillir le visiteur.
Notre auberge, à deux pas du métro, est tenue par un frère et une sœur très sympas, avec qui nous discuterons bien tout au long de ces neuf jours.
On découvre ici les "joies" de se faire régulièrement la cuisine et de dormir en dortoir. Après avoir explosé notre budget au Brésil, on essaye de prendre un rythme de vie plus modeste car l'Argentine n'est pas vraiment moins chère que son grand voisin.
Situés en plein San Telmo, quartier festif et légèrement touristique, ça nous permet de sortir à pieds le soir pour profiter de l'animation qui suit la sieste "espagnole" après 17h, dans cette ville qui nous semble sûre, avec un peu partout des policiers isolés qui surveillent les endroits fréquentés. On se demande d'ailleurs si leur présence est préventive ou curative.
On arrive un dimanche, et comme toutes les semaines c'est la grande braderie du quartier, qui part d'une place qui rappelle fortement celle des tertres à Montmartre, petite et carrée, avec des stands d'artistes et de brocanteurs.
La rue dans laquelle se poursuit ce grand marché fait elle penser aux puces, avec de jolis stands, certains de créations originales, d'autres moins intéressants. Le tout sur fond d'ambiance hippie.

Grande braderie du dimanche à San Telmo

On assiste à notre premier moment tango avec un petit groupe d'artistes de rue.

Le soir, on va dans un resto spécialisé dans la parilla, le barbecue argentin, pour goûter la viande des gauchos, élevée en plein air, et d'une tendresse faisant honneur à sa réputation.
Le lendemain, on se lève tard, nous calant progressivement sur le rythme argentin, et on va faire du change à l'adresse indiquée par l'auberge. Ça se passe dans un appartement anonyme, au dixième étage d'un immeuble du centre, avec un comptoir tenu par deux bonhommes. On se demande encore une fois comment ce taux officieux peut exister, surtout aussi officiellement, car ici les gens crient dans la rue et devant la police "cambio", rabattant les passants vers leur "bureau de change".
On se demande aussi si ça craint, comment est la sécurité, est-ce que la mafia est derrière toutes ces piles d'argents ? Quel rapport avec la police ? Jusqu'où vont les pots de vin et la corruption ?
On va faire un tour sur la plaza Mayo où se situe le palais présidentiel, la Casa Rosada, et des manifestations en mémoire des diparus sous la dictature militaire, puis on rentre chez nous en métro, découvrant des wagons "vintages" où les sièges doivent être d'une autre époque et les ampoules apparentes ! L'escalator est en bois et le métro fait un bruit de train à vapeur.

Palais présidentiel Casa Rosada

Manifestations en faveur des disparus sous la dictature militaire


Sièges d'époque et ampoules apparentes
Escalator en bois
La journée du lendemain, belle et ensoleillée, se passe à Palermo, le quartier bobo de la ville. Rues pavées, bars et restos sympas avec terrasses sur trottoir, boutiques tendances et/ou vintages, on y passe un très agréable moment.
On y voit les portenos (habitants de BA) tel qu'on les imagine : élégants, fins, avec du style, beaucoup plus proches des européens que des brésiliens.
On prend goût au vin rouge argentin : bon et pas cher.

Palermo, un quartier beau et bobo

Une belle allée d'arbres tipas
Pour la veille de Noël, on se balade de nouveau dans San Telmo, cette fois-ci vidé de sa braderie et de ses badauds. On y voit la miniscule casa minima et la statue de Mafalda, célèbre héroïne de BD argentine et mascotte de la ville, assise sur un banc.

Casa minima : 2,70m de large

Mafalda sur son banc, mascotte de la ville
Le soir, on participe à la parilla organisée par l'auberge pour les jeunes qui comme nous sont sans famille. C'est la première fois que Laurent fête Noël hors de France. Ambiance sympa mais pas non plus folichone. À minuit, des feux d'artifices sont tirés d'un peu partout en ville : tradition très sympathique.
Journée off le 25.
On reste à l'auberge, on decompresse. On est ici, comme à chaque grande ville, toujours en train de se demander quoi faire, comment le faire, comment y aller, comment ne pas trop dépenser, que choisir entre ce musée et ce parc, resto ou sandwich, spectacle ou film tranquille à l'auberge. Comment articuler et optimiser le programme entre les différents quartiers sans traverser toute la ville à chaque fois. On veut se laisser aller mais on se laisse happer par la ville et notre envie de tout découvrir. On pense à la suite de l'Argentine et là aussi on est un peu dans le flou. C'est grand, immense même, et c'est les vacances scolaires ce qui s'annonce cher et difficile pour l'improvisation car bondé. On a la tentation d'aller au grand sud voir les glaciers, et en même temps on aimerait aussi passer du temps dans le nord du pays vers Salta, en Bolivie et au Pérou. Trop de choses :)
Le 26 on se balade dans une ville déserte, sans doute encore en pleine digestion. On voit quand même quelques beaux monuments.

Palacio Barolo

L'entrée d'un centre commercial !
On change le reste de nos euros, cette fois-ci à l'arrière d'un magasin de téléphone d'où sort une longue file d'attente a priori pas là pour recharger son mobile... Ensuite, on réserve un bus qui nous amènera dans la Pampa, en dehors des zones très touristiques.
On essaye ensuite de réserver un spectacle de tango pour le soir, mais tout est fermé à l'exception du fameux café Tortonni qui est du coup assailli par les touristes en errance dans ces rues vides.
Finalement, on revient prendre une bière à San Telmo et on tombe sur la fin d'un spectacle de flamenco dans un bar. On se dit qu'on reviendra le lendemain, et qu'on verra plus tard pour le tango.

Spectacle de flamenco dans un bar
Dans les jours qui restent on visite :
- le quartier de la Boca et son Caminito (petit chemin) très coloré,


- une super expo où on découvre un artiste asiatique qui réalise d'immense toiles en faisant exploser de la poudre à canon selon certains motifs figuratifs,

Cactus à gauche, chutes d'Iguaçu à droite, "peints" à la poudre de canon
- le quartier de la Recoleta d'inspiration parisienne avec un cimetière rappelant le Père Lachaise,

Quartier Recoleta et son cimetière


Et son centre culturel juste à côté
- le jardin japonais du quartier Palermo, asiatiquement kitsh et très agréable.


On parvient aussi, grâce à une bonne adresse du Petit Futé, à passer une soirée dans une milongas (endroit dédié au tango) pour prendre des cours, écouter un groupe et regarder de bons danseurs de tango. On a donc d'abord pu comprendre les pas de base avant d'admirer la complexité et la variété de cette musique/danse.
Le groupe était magique, avec ses 3 violons, ses 3 accordéons et son piano suivant le rythme d'une contrebasse (ici pas de batterie). Tantôt rapide, tantôt lent, des fois tristes d'autres joyeuses, se rapprochant parfois de l'Opéra rock quand la belle voix du chanteur s'en mêle, changeant d'intensité très rapidement passant de la plainte à la violence.
Jeunes ou vieux, ils sont tous beaux à voir danser, chacun dans un style différent alors même que la musique est identique pour tous : chauds comme le Brésil, réservés comme l'Europe, tempérés et fiers comme l'Argentine.
Et comme quand on a assisté à un samba à Rio, on voit quelques monsieurs d'un certain âge, experts danseurs sur leur 31, venus faire danser leur femme avec sérieux, répétant des pas qu'ils ont sans doute exécutés des milliers de fois auparavant. Le visage grave marqué de temps en temps par un sourire. Les bras le long du corps, l'air ennuyé, on a l'impression qu'ils s'en foutent mais hop, tout d'un coup ils esquissent un pas difficile l'air de rien et se remettent en position nonchalante.

Révélation tango

Avant de finir, on ne peut pas ne pas évoquer des gens qu'on voit partout ici, à toute heure du jour et de la nuit, et qui montrent que malgré son développement occidental l'Argentine a aussi ses très pauvres : les cartonneros.
En train de pousser un chariot plein de leur dernière trouvaille, dans un contenaire à remuer les ordures ou devant des sacs poubelles qu'ils déchirent soigneusement à la recherche du précieux carton, ils sont hyper organisés et efficaces.
Souvent en groupe, avec le sourire, on apprend qu'avant un train/tram leur était dédié à BA afin de faciliter leurs déplacements.
Impressionnant et difficile de voir ça.
On part pour 8 heures de bus de nuit en direction de la Pampa et de sa capitale Santa Rosa. On espère y prendre l'air et trouver une hacienda pas trop touristique ni trop chère pour y passer quelques jours.
Ça comence bien, à part le chauffeur de taxi personne à qui on a parlé à BA ne connait cette ville de pourtant plus de 100 000 habitants. ? Les gens nous demandent même pourquoi on y va :)
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