Après avoir vu les matatus suicidaires au Kenya, on avait un peu peur de nos 4h de route en taxi-brousse, même s'il était privatisé par l'ONG Manda, ce qui nous a notamment permis de franchir les innombrables barrages de police (à la recherche de backchich ?) sans trop de problèmes. Au final, la route est en bon état et la conduite pas trop stressante.
Un taxis-brousse rien que pour nous
Ça nous permet de profiter des magnifiques paysages, variés, qui semblent être un mélange d'Asie (rizières), de Provence (vallonnés et rocailleux), de Maroc (terre rouge arride), de Kenya (petites maisons en dur très colorées), etc.
Paysages magnifiques le long de la route
En plus de ça, les malgaches donnent vie à ces campagnes avec peu de moyens et nous donnent à voir des scènes fortes et pittoresques. Entre ceux qui marchent le long de la route un panier en équilibre sur la tête, ceux qui retournent la terre à trois, en rythme, et qui ne se decouragent pas devant les étendues qu'il leur reste à faire, les femmes et les enfants qui viennent vendre des fruits et des gâteaux au moindre arrêt du bus, on a envie de s'arrêter tous les 100m pour prendre des photos, profiter, regarder et tout mémoriser.
Scènes de vie tout au long de la RN7, la route du Sud
On arrive finalement à Betafo, un village connu pour ses sources thermales, dans lequel nous passerons 3 nuits avant de rejoindre Antsirabe, la petite ville voisine, pour 1 nuit. Et cela 2 fois de suite car la colo se décompose en 2 "vagues" de 50 enfants (1 vague par semaine, pour pouvoir emmener le maximum d'enfants en vacances), les petits d'abord les grands ensuite, et nous avons la chance de les accompagner toutes les 2.
La cathédrale de Betafo
Le camp d'accueil est très grand, à l'écart du village, et nous découvrons agréablement surpris des dortoirs confortables avec des lits superposés. Tellement confortables que certains enfants ont été émus en voyant ça : contents d'avoir pour une fois leur lit à eux (même si au final ils dormiront parfois à 2 ou 3 pour se tenir chaud), avec aussi une pensée pour leur famille ?
On dormira donc avec les enfants, garçons d'un côté, filles de l'autre. Ça promet de l'animation et peu d'intimité.
Camp d'accueil spacieux
Nature environnante
Dortoirs tout confort
La découverte des lieux passée, place aux activites. On commence fort avec les jeux préparés la semaine précédente. Malgré le peu de temps avant la nuit, le puzzle, le jeu de l'oie et les autres préparations ont un certain succès et donnent le ton de ces quelques jours.
Activités préparées la semaine d'avant
Puis c'est film sur vidéoprojecteur en attendant le dîner.
On passe à table et on fait connaissance avec ce qui deviendra bientôt notre cauchemar : le soussou. De la bouillie de riz à l'eau, molle et sans consistance, sans gruyère râpé (...) sans beurre et même sans sel ! On y aura le droit matin et soir, avec un répit le midi où c'est le riz blanc sec qui est de mise. Toujours sans sel bien sur.
Madagascar est le plus gros consommateur au monde de riz par habitant et on peut dire qu'on aura vécu l'expérience jusqu'au bout, même si après quelques repas on allait piquer le sel de la cuisinière :)
Refectoire
Soussou :( !!!
Ce sont les enfants qui font la vaisselle, comme ils ont d'ailleurs participé à la cuisine. Le thème "vivre ensemble" sera respecté tout au long de ces 10 jours, sans plaintes et même plutôt avec plaisir. C'est beau de voir ça.
Ici c'est le "vivre ensemble". Les enfants participent à tout
Laurent : quand je pense qu'au même âge je comptais le nombre de petites cuillères que je lavais en plus de mon frère.
Leila : nous on comptait les frites :)
Couché tôt et réveil à 6h tous les jours pour la gymnastique matinale à laquelle nous n'avons jamais participé, prolongeant le sommeil d'1/2h... Toilette à l'eau froide (et dans le froid !), jeux dans la pelouse, souvent assez violents que ça soit pour les garçons comme pour les filles, puis soussou matinal :(
Pour le premier jour, on va se baigner aux thermes de Ramafona, constitués d'une piscine d'eau tiède, d'une pateaugoire et de baignoires d'eau naturellement chaude. On laisse la piscine aux enfants qui s'éclatent et on attend notre tour dans un des bains pour ce qui sera notre seule douche. Et c'est peu dire qu'il y a de la crasse à enlever, surtout avec la 2ème vague où ça fera plusieurs jours sans se laver !
Piscine tiède
Pataugeoire et baignoires chaudes
Pour y aller et pour en revenir, on fait une marche de 30 minutes au milieu des rizières et on voit même une petite chute d'eau. On croise à chaque fois les mêmes femmes en train de faire la lessive dans le ruisseau puis d'étendre le linge à même le sol. Simple et champêtre.
On découvre les zébus, ces vaches malgaches avec une bosse sur le dos, et les locaux nous découvrent et nous saluent à coup de "bonjour vazaha" (bonjour blanc) qui nous amusent au début puis finissent par nous agacer.
L'après-midi c'est activité masques en papier mâché, proposée par... L&L :)
On apprend de nos erreurs, et on expliquera bien mieux les tenants et aboutissants lors de la seconde vague. Cela n'empêche pas les enfants de nous pondre de jolis résultats en trois étapes : papier mâché, soucouche de peinture blanche puis coloration.
Phase papier mâché
Phase sous-couche blanche
Phase coloration
On termine le séjour à Betafo par un nouveau passage aux thermes et un après-midi dans un immense espace de jeux avec des terrains de foot, de basket et de volley.
En dehors du programme, quelques observations personnelles.
L'objectif principal de la colo est 100% atteint avec des enfants heureux d'être en vacances, qui profitent de ce type d'activités pour la première fois de leur vie pour certains. Une équipe d'encadrants qui fait preuve d'un dévouement extraordinaire et une solidarité entre enfants qui est belle à voir (thème du vivre ensemble, les grands s'occupent des petits).
Tout le monde nous avait dit de prendre des pulls et ils n'avaient pas menti. Il fait très très froid, et si nous sommes bien couvert il est parfois difficile de voir certains enfants grelotter en tee-shirt.
Ici, personne n'a de lunettes, et quand on s'en rend compte on se demande ce qu'ils voient quand on sait que chez nous plus de la moitié des personnes sont corrigées ! Au niveau dentition, pour beaucoup c'est en très mauvais état. Même si, en général il reste une ou deux dents pour qu'on voit bien que les autres manquent :)
L'ensemble du séjour est assez fatigant avec un manque d'intimité et une proximité constante avec les enfants. En plus, Leila se fait attaquer par les puces (très présentes à Madagascar) et a développé une allergie ! Ça, en plus de la peur d'attraper des poux (Leila porte un foulard sur ses cheveux), cela génère un peu de stress et de questionnement à chaque fois qu'on est proche des enfants. On a honte, mais les câlins deviennent de moins en moins spontanés de notre côté et c'est un peu triste.
Pour finir la semaine, on visite 2 lacs, avant d'aller dormir à Antsirabe.
- lac Tritriva : petit, beau et étrange, bleu profond, tellement profond que le fils Cousteau a tenté d'atteindre le fond sans y parvenir, mais l'a mesuré aux ultrasons comme faisant 158m de profondeur. Un vendeur de cuba, gâteau de maïs, a tenté de nous arnaquer devant tout le monde en nous vendant une tranche 2 fois plus chère que les 100 qu'il venait de couper pour la colo devant nos yeux, avant de s'excuser devant le scandale qu'on lui a fait.
Lac Tritriva
Et son vendeur de cuba escroc
- lac Andraikiba : plus grand, plus classique, plus "balnéaire". Les enfants étaient fous quand on leur a annoncé qu'ils allaient faire un tour de bateau.
Lac Andraikiba
Durant le pic-nic, on a donné le surplus de riz à des enfants du coin cachés dans les fourrés, qui n'ont sans doute pas la chance d'être pris en charge par une ONG. Ça nous a bien rappelé à quel point la pauvreté est ici omniprésente.
Antsirabe est une petite ville très agréable, où la spécialité locale est le pousse-pousse et le cyclo-pousse.
Antsirabe, dortoir moins confortable qu'à Betafo
Pour le dernier soir on fait une super fête avec les enfants : danse, théâtre, jeux collectifs puis jus de fruit, biscuits et pain d'épice au Nutella. Ils vont se coucher des étoiles dans les yeux, et se réveillent le lendemain pour aller faire un tour de voiturette, un de cheval puis un du fameux pousse-pousse avant de rentrer par le taxi-brousse du retour pour Tana.
Nutella et danse pour la dernière soirée

Un tour de voiturette
Un tour de cheval
Et un tour de pousse-pousse
Après cette première vague, on reste sur place avec une autre encadrante, Tina, avec qui nous préparons l'arrivée des grands enfants qui feront 5 jours identiques aux petits.
À ceci près que le budget étant plus large que prévu, ils arrivent à 70 au lieu de 50 !!! Déjà qu'on appréhendait le contact avec les ados, on est un peu submergé.
On se rend compte qu'on est crevé après ces 5 premiers jours et qu'on manque de punch. On s'est attaché aux petits qui sont repartis trop vite, et on relâche alors la pression. Les grands arrivent mais ils se laissent moins facilement approcher (il ne suffit pas d'un guili ou d'un sourire), et on manque d'énergie et de motivation pour faire connaissance pour "seulement" quelques jours. Du coup on se met à l'écart, regardant d'un peu loin ces ados indépendants qui ont besoin de temps pour faire confiance. On ne commencera à discuter avec eux qu'à la fin, quand la distance se sera estompée.
Un peu frustrant pour nous ces 2 vagues, même si au final c'est génial d'avoir pu emmener autant d'enfants en vacances, d'autant qu'ils se sont amusés comme des fous. Nous aussi.
Ce fut bien sûr très enrichissant, très plaisant, mais un peu décevant la dernière semaine et éreintant.